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Brexit: panique sur le marché immobilier au Royaume-Uni?

L'immobilier au Royaume-Uni commence à être secoué.

L'immobilier au Royaume-Uni commence à être secoué. - Bertrand Langlois - AFP

Après Standard Life, Aviva Investors, M&G Investments, Henderson Global Investors et Columbia Threadneedle, Canada Life a annoncé à son tour le gel de l'un de ses fonds immobiliers face à l'afflux des demandes de retrait. Certains y voient le signe inquiétant d'un possible début de panique post-Brexit.

Un sixième groupe financier a annoncé la suspension d'un de ses fonds immobiliers au Royaume-Uni. Canada Life a expliqué cette décision par l'"incertitude" autour de la "valeur" de ses actifs immobiliers et par la "hausse récente des demandes de retraits" après "le vote sur la sortie de l'Union Européenne".

Un peu plus tôt dans la journée, Columbia Threadneedle a noté dans un communiqué avoir gelé les activités de deux fonds immobiliers. Il a souligné avoir été en capacité de faire face aux demandes de retraits de ces investisseurs jusqu'à présent, mais a précisé interrompre l'activité car il s'attend à ce que "ces demandes de ventes continuent" d'affluer.

De son côté, Henderson Global Investors déplorait: "La décision a été prise en raison de pressions exceptionnelles exercées sur les fonds, résultat de l'incertitude suivant le référendum sur l'UE et la récente suspension d'autres fonds immobiliers".

La veille, la firme M&G Investments expliquait: "Les demandes de remboursement des investisseurs ont augmenté de façon marquée en raison du haut niveau d'incertitude dans le marché immobilier britannique depuis le résultat du référendum sur l'Union européenne".

"Les demandes de remboursement ont atteint un tel niveau que M&G pense qu'il peut mieux protéger les intérêts des actionnaires du fonds en suspendant temporairement son activité", a ajouté le groupe. Le fonds en question, Property Portfolio, a investi dans quelque 178 actifs immobiliers commerciaux des secteurs de la distribution, de l'industrie et des bureaux. Il gère quelque 4,4 milliards de livres d'actifs immobiliers au total au Royaume-Uni (5,2 milliards d'euros).

Dans le détail, les opérations autour du fonds Property Portfolio ont été suspendues dès lundi midi et elles ne seront pas traitées tant que le fonds sera suspendu. M&G a précisé qu'il réétudierait cette suspension tous les 28 jours.

"Les dominos commencent à tomber"

Standard Life et Aviva Investors avaient déjà annoncé des suspensions similaires lundi soir et plus tôt mardi, pour des fonds gérant respectivement 2,9 milliards et 1,8 milliard de livres.

"Les dominos commencent à tomber sur le marché immobilier commercial britannique alors qu'un autre fonds ferme ses portes en raison de demandes de retraits précipitées par le vote sur le Brexit et cela n'est probablement qu'une question de temps avant de voir d'autres fonds suivre le même chemin", avait commenté Laith Khalaf, analyste chez Hargreaves Lansdown, lors de l'annonce d'Aviva.

Résultat, si la théorie des dominos se confirme, l'offre d'immobilier commercial pourrait affluer sur le marché, "ce qui devrait entraîner une pression à la baisse sur les prix", ajoute l'analyste. "Les investisseurs étrangers pourraient être tentés par la chute de la livre mais ils pourraient aussi bien décider de rester à l'écart d'une économie plongée dans l'incertitude", juge-t-il.

Rappel inquiétant, le dernier crash immobilier dans le pays, à l'orée de la crise financière mondiale de 2008, avait démarré par les difficultés des fonds à faire face à leurs obligations. Face à cette situation "précaire", "les investisseurs deviennent très nerveux (...) La dernière fois que nous avons vu ce genre de mesures était durant la crise financière", a souligné Mark Priest, d'ETX Capital.

Le BTP tremble

Après s'être effondrée en 2008, la pierre a connu une véritable renaissance, portée par l'empressement des classes supérieures britanniques de placer leurs revenus et par des masses de liquidités en provenance notamment du Golfe ou de Russie. Ce boom s'est accéléré à partir de 2013 et, à Londres, les prix sont aujourd'hui supérieurs de plus de 50% à ceux du pic d'avant la crise.

Au-delà de l'immobilier commercial, c'est le secteur du BTP qui tremble désormais en Grande-Bretagne depuis le vote sur le Brexit, après avoir connu de premiers signes de ralentissement ces derniers mois.

En juin, selon l'indice PMI publié lundi par le cabinet Markit, le secteur de la construction a connu son plus mauvais mois depuis sept ans, plombé par "des décisions d'investissement largement repoussées et la peur sur le marché résidentiel", selon Tim Moore, économiste chez Markit. Cette enquête couvrait essentiellement les jours d'avant le référendum.

D. L. avec AFP