BFM Patrimoine
Retraite

La bâtonnière de Paris dénonce "un passage en force" pour les retraites des avocats

Invitée sur BFM Business, Marie-Aimée Peyron exprime la colère et la déception des avocats face à la réforme de leur régime qui se ferait, selon elle, sans concertation.

Le torchon brûle à nouveau entre les avocats et le gouvernement au sujet de la réforme du régime spécifique des retraites de la profession. Invitée de l'émission "12H, L'Heure H" sur BFM Business, Marie-Aimée Peyron, bâtonnière de Paris, n'a pas de mots assez durs pour dénoncer la méthode du gouvernement qualifiée de "passage en force".

"Nous sommes profondément déçus, choqués et très en colère parce que notre président de la République avait dit à Rodez que le gouvernement ne passerait pas en force, qu'il entendait privilégier la concertation. Nous n'avons eu qu'une seule réunion qui devait être prolongée, le rendez-vous a été reporté avec le haut-commissaire Monsieur Delevoye et Nicole Belloubet, notre ministre de la Justice. Et tenez-vous bien, le rendez-vous est fixé au 23 octobre", explique-t-elle. "Or, vendredi (dernier) a été adoptée une disposition par la Commission sociale de l'Assemblée nationale au terme de laquelle est retirée purement et simplement la fixation et la revalorisation des pensions de retraite de base à notre caisse de régime de retraites. Et ceci va être décidé aujourd'hui, donc nous disons c'est un marché de dupes".

Une "totale incompréhension"

Et de poursuivre. C'est "une totale incompréhension de vouloir passer en force subrepticement par la Commission sociale dans le cadre d'une loi de financement de la sécurité sociale et de prévoir des dispositions spécifiques aux avocats, retirant la gestion et la fixation des retraites par notre caisse. C'est inadmissible. Désormais, la revalorisation des pensions au-delà de 2000 euros (...) sera fixée par l'Etat. Ca signifie très clairement de retirer à notre caisse de retraite la possibilité de gérer".

Marie-Aimée Peyron souligne que la profession n'a pas été prévenue du vote de cet amendement. Une lettre a été adressée au garde des Sceaux "dès que nous avons su ce qui était en train de se tramer".

"Soit cette disposition est retirée immédiatement (...) et nous serons au rendez-vous [de l'entretien prévu mercredi avec Jean-Paul Delevoye et Nicole Belloubet, NDLR], soit ce n'est pas la peine, nous ne maintiendrons pas en ce qui nous concerne le rendez-vous".

Hors de question de rejoindre le régime général

Le bras de fer se poursuit et la balle est donc dans le camp du gouvernement. En tout cas, à l'heure actuelle, "nous n'avons eu strictement aucune réponse à notre lettre", regrette la bâtonnière.

Rappelons que les avocats disposent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale d'un régime de retraite autonome, géré par leurs soins et excédentaire aujourd'hui de 2 milliards d'euros. La réforme propose que l'Etat fixe les montants des pensions au-dessus d'un certain niveau et garde la main sur la valeur du point. L'objectif est également que ce régime autonome rejoigne à terme le régime général. "Hors de question", répond Marie-Aimée Peyron.

"Nos réserves sont là pour juguler un inversement de la courbe démographique et puis surtout, nous sommes des professionnels libéraux, nous payons 100% de nos cotisations sociales (...), contrairement aux salariés du régime général qui supportent 40% de leurs cotisations. Comment mélanger des choux et des carottes ? Ca n'a strictement rien à voir".

Olivier Chicheportiche