La cour, la SNCF et la société du spectacle
Quand la cour des comptes veut faire le « buzz » sur le dos de la SNCF, elle envoie le signal qu’elle non plus, ne comprend pas grand-chose à la vie des entreprises
Les avantages des cheminots. Dieu sait qu’on ne trouvera plus grand monde pour les défendre. Et fort de cet adage, la cour des comptes se dit qu’elle va lancer cet os aux chiens que nous sommes (journalistes) et qu’elle doit sans doute souverainement mépriser (d’ailleurs elle n’a pas tort puisque ça marche)
Donc les cheminots bénéficient d’avantages « indus » au titres de billets gratuits, pour eux et leur famille, et (ça, ça vaut son pesant de cacahuètes) « la perspective de l’ouverture totale du transport ferroviaire à la concurrence nécessite d’ouvrir le dossier »
La cour avance une fourchette « un cout d’une cinquantaine de millions d’euros à des sommes dépassant significativement les 100 millions d’euros ». On goûte la précision. Et pour cause. Le calcul de ce coût est infiniment complexe. Marginal et quasi nul dans des trains où il y a de la place, coût commercial plein pot dans les trains bondés. Il faut donc reprendre billet par billet. La cour a-t-elle fait ce travail ?
Si oui, c’est du temps perdu, et c’est bien elle qui doit se remettre en cause. Outre le poids très relatif d’une dépense de 100 millions d’Euros sur un chiffre d’affaires qui dépasse les 30 milliards, la cour ne peut pas ignorer qu’il s’agit là d’un élément symbolique et structurant du pacte social de l’entreprise, et que l’on peut penser (comme la réformes des retraites de Sarkozy) qu’y toucher coûterait sans doute plus que ça ne rapporterait à l’entreprise
A un moment, il va falloir que nos élites administratives s’intéressent au contrat social. A l’alchimie très étrange qui fait qu’une entreprise fonctionne, aux équilibres toujours fragiles mis en place par les DRH. Je vais vous le dire franchement, je mets dans le même sac les matamores de foire agricole qui nous disent qu’il faut « travailler 39 heures payées 35 ». Peut-être, j’en sais rien, eux non plus, dans tel secteur, pas dans d’autres, dans telle entreprise, et d’ailleurs souvent, si c’est le cas, elle le fait déjà, pas dans d’autres qui ont fait d’autres choix sociaux
L’entreprise servait de slogan dans les années 70. On voit où ça nous a mené. Le problème des 35 heures, c’est moins les 35 heures que la taille unique.
Bref, messieurs, ce serait trop demander que de réfléchir deux minutes avant de parler des relations de travail ?
(si le propos vous énerve, c'est légitime, je m'en explique un peu plus ici)