Georges Gambarini (KPMG) "Nous sommes dans la nécessité de faire croître l’écosystème de l’innovation"
Derrière l’énigmatique Venture Capital (VC) se cache une dynamique capable de bousculer le présent pour consolider l’avenir. Georges Gambarini (Responsable National du Marché des Entreprises de Croissance – Spécialiste Innovation & Fundraising, KPMG) revient sur la place de cet investissement à destination majoritaire des start-up Tech et sur le rôle croissant des grands groupes qui en sont d’importants pourvoyeurs, tant sur le plan business que capitalistique.
Mondiale, enrichissante et anglophone, une étude annuelle dirigée par KPMG dissèque l’évolution des investissements en capital-risque dans les start-up Tech en Amérique, en Europe et en Asie. Elle recense sur 104 pages les transactions (deals) depuis l’amorçage jusqu’au capital développement. Cependant, "l’exhaustivité est impossible à obtenir, car certains deals ne sont jamais publiés et les données sur certaines zones géographiques compliquées à obtenir, tout l’intérêt de cette étude unique en son genre est de permettre de comparer des dynamiques et de suivre leur évolutions dans le temps", précise Georges Gambarini.
Un ticket moyen en hausse
La tendance 2017 porte sur la taille des opérations. « On constate un phénomène de concentration dû à la maturité des marchés Tech, explique Georges Gambarini. L’impérieuse nécessité de consolidation et de mise à l’échelle des start-up (ex ; foodtech, adtech), et l’émergence de territoires d’innovation , toujours plus complexe (ex : IA, Biotech..), mobilisent mécaniquement des financements plus importants.", D’où l’augmentation du ticket moyen des deals. "Nous sommes sortis de la phase que j’appelle ‘spray and pray’, où l’on éparpillait ses placements pour multiplier ses chances, et où l’on priait pour un résultat ! Désormais, les investisseurs ont plus de recul et sélectionnent plus notamment en phase d’amorçage où ils s’engagent sur moins de projets. A l’inverse la part des late deal plus sécurisant mais mobilisant plus de 20M€ augmente pour représenter 70% des capitaux investis et 10% des tours de table dans le monde."
L’implication des corporates
Autre enseignement de l’étude, l’implication croissante des grandes entreprises (corporates). En Europe, elles participent à 15% des deals. Et déjà 35% en Asie. "Ce phénomène est un autre signal de la maturité de l’écosystème. La France est à la croisée des chemins, avec d’un côté une nécessaire consolidation sur des segments tech matures dit LOW TECH né il y a dix ans, de l’autre un renouvellement des technologies dans le cadre de la Deep Tech. Nous sommes dans la nécessité non plus de faire émerger l’écosystème de l’innovation, mais de le faire croître Les grands corporate ont bien évidemment un rôle à jouer" Même écho chez Bpifrance pour qui le corporate venture capital (CVC) s’impose comme "le maillon fort de la chaîne de financement des start-up en France".
La fin d’un cycle
Ce maillon des CVC aurait-il vocation à étendre sa puissance ? Après cinq à sept ans d’existence, les premiers investissements massifs dans la Tech doivent désormais produire une rentabilité. Si les start-up ne délivrent pas de retour sur investissement (ROI), « le risque est de ne plus générer de nouveaux financements et de voir la machine se gripper », estime Georges Gambarini. Il y a donc urgence à préserver le cercle vertueux : les corporates en France ont donc un rôle à jouer pour prendre le relais et participer à l’émergence de start-up leaders au plan mondial.
Les start-up, avenir des corporates ?
L’influence des CVC ne cessera pas de grandir puisque les technologies de demain seront indispensables à la propre existence des corporates : « En entretenant une R&D externalisée, confiée à des start-up, incubateurs ou pépinières, les grandes entreprises sourcent des idées et des talents parfois difficiles à intégrer naturellement, et garantissent leur crédibilité. » En bout de ligne elles peuvent infuser une culture, pour évoluer et transformer leur modèle économique. « Le CVC efficace adoptera un démarché d’investissement très professionnalisée qui alliera la vision financière à la vision business pour chercher à anticiper l’impact des projets sur son propre modèle », résume Georges Gambarini. Sont ainsi visées par exemple les Fintech, Biotech,BrainTech, et etGreentech, qui nécessiteront toutefois d’accepter un rendement à long terme.