Cri de rage
Il ne s'agit pas d'argent, il s'agit de mépris
Il résonne d’autant plus fort qu’il est inaudible en France. Un patron de plus qui hurle sur les impôts, tu parles !
Sauf que là c’est fort, parce que ce ne sont pas les impôts, c’est le mépris et la destruction de l’enthousiasme (la video est là)
Un mot de l’entreprise, Gravotech. L’Entreprise de taille intermédiaire comme on en rêve, 90% de chiffre d’affaire à l’export, 60% de sa production en France, 120 millions de Chiffre d’affaires.
Gravotech fabrique des machines à graver. Tout graver. Toutes les pièces industrielles. Pas une voiture ne roule dans le monde, pas un avion ne vole, qui n’ait pas, quelque part, un élément gravé par Gravotech. La force de l’entreprise, c’est entre autre de donner à ses machines la capacité de pouvoir graver dans toutes les langues, y compris en braille, par des solutions logicielles ultra innovantes.
Enfin, le fisc vient de considérer que non, justement, ça n’était pas innovant parce que « la recherche ne s’est pas faite dans les règles de l’art » C’est écrit en toutes lettres dans le document que l’entreprise a reçu le mois dernier. Redressement sur 100% du crédit d’impôt recherche accordé ses 3 dernières années.
Là, il faut vraiment que j’insiste, parce que cela m’a saisi ce matin : ce n’est pas une histoire d’argent, Gravotech s’en remettra, « c’est l’insulte, qui blesse ! Les équipes de recherche de l’entreprise, des docteurs, des ingénieurs, à qui l’on dit, comme ça, qu’ils ne savent pas chercher. Qu’ils brassent du vent. Qu’ils travaillent dans le vide. Que la nation n’a aucune reconnaissance particulière à leur accorder. Toutes nos inventions sont brevetées, internationalement, mais elles ne sont pas innovantes au sens du fisc français. Nous sommes les seuls au monde à faire ce que nous faisons dans des domaines ultra techniques, mais Bercy juge que nous n’avons rien inventé »
Je assure qu’en me racontant cela le patron de Gravotech en tremblait d’émotion, « personne ne peut imaginer le choc que ça représente pour des hommes et des femmes qui ne quittent pas les labos pendant des semaines. Au nom de quoi. De quelle compétences, est-ce qu’on se permet ces jugements à l’emporte pièce ? » . Non, personne ne peut imaginer, et moi-même je ne l’imaginais pas, avant de le constater, physiquement, ce matin.
La question n’est pas anecdotique. Des affaires comme celle-là se multiplient, malgré, visiblement, les consignes ministérielles. Hier encore, Bernard Cazneuve appelait l’administration fiscale à construire un climat de confiance avec les entreprises.
Il ne s’agit pas de chantage à la délocalisation, ou de figures classiques 100 fois répétées sur la pression fiscale. Il s’agit d’enthousiasme, d’envie, cette alchimie tellement complexe de l’entreprise de croissance, que l’on ne peut pas balayer d’un revers de main.
Au lendemain de la grande démonstration politique au service de la renaissance de la France industrielle, c'est un retour sur terre.