Dexia, le Conseil Constitutionnel a rallumé une bombe
C’est impropre, d’ailleurs, on devrait dire « réamorcé ». Mais alors c’est moche. Bref, on pensait limiter la casse avec cette faillite considérable. Ce sera plus compliqué que prévu. Mais l’enjeu se chiffre en centaines de milliards
D’ailleurs le gouvernement va tout de suite retourner au charbon, essayer de bidouiller au plus vite un nouveau texte qui passe la barre constitutionnelle
Bidouiller
Parce qu’on en est là
Mais j'ai lu, ici ou là que l'on fabriquait "en catimini" une amnistie. Foutaises! le "catimini" c'est le vote, public, du parlement, et "l'amnistie", c'est juste essayer de limiter la casse. parce que vous allez le voir, on a tous intérêt à ce que le bidouillage tienne la route
On fait bref, vous avez, même de loin, suivi la faillite de cette banque franco-belge, rattrapée par l’effondrement du marché immobilier US sur lequel elle avait investi au plus mauvais moment. Très exactement d’ailleurs, l’immobilier et les assurances, en bowling c’est un strike, toutes les quilles par terre.
Il ne reste plus rien de Dexia que des dettes, des produits invendables dont on espère qu’ils le seront un jour et une série de crédits accordés aux collectivités locales dans des conditions rocambolesques.
Là encore, le sujet, à lui seul, vaudrait un billet. Quand les maires, les élus départementaux, régionaux, viennent nous dire, la bouche en fleur, qu’ils ne savaient pas ce qu’ils signaient, un certain nombre d’entre eux se foutent de nous ouvertement. Dire que dans une ville comme Saint Etienne ou dans un département comme la Seine Saint Denis on se fait gruger comme la veuve de Carpentras, c’est un peu gros.
Mais justement
Tout est dans le « un certain nombre », le « un peu gros». Qu’est-ce qui relève de la fraude, de l’incompétence, ou de la connivence ? Connivence, parce que beaucoup d’élus ont évidemment applaudi des deux mains une solution « innovante » qui consistait à pouvoir s’endetter sans frais, construire le rond-point et la salle polyvalente, en reportant les échéances sur les générations futures (je vous le dis vite, le nœud du problème, c’est que le taux d’intérêt, exactement Taux Effectif Global, n'était pas explicitement spécifié au moment de la signature. C’est parfaitement illégal. Et cela va donc le rester)
Les enjeux sont considérables. La faillite a déjà coûté 6,6 milliards à l’Etat (cour des comptes), la somme des différents produits structurés qui dorment dans les coffres de Dexia dépasse les 200 milliards (à la louche).
L’Etat ne pouvait se permettre, en plus, de gérer des centaines de contentieux en justice aux conséquences à nouveau inestimables
Ça fait de l’inestimable au carré, si vous voulez.
Bref, ça fout les jetons
Et donc on a bidouillé un texte qui instaurait, c’est vrai une forme « d’amnistie ». On considérait que les emprunts entre Dexia et les collectivités locales étaient tous légaux, à charge pour l’état de trouver un moyen de régler une partie de la facture. Il y avait même quasi-unanimité à l’assemblée pour approuver cette solution bancale (pas d’illusion, la faillite d’un département serait de toute façon retombé sur le contribuable national, on se donnait simplement la possibilité de gérer ça en douceur) . Il y avait bien sûr de fortes voix contre cette amnistie, notamment celle… des avocats. Ça me fait sourire.
Sauf que ça ne passe pas
Trop bancal pour le Conseil. Disons-le, on tordait le droit, y compris, disent les spécialistes, le droit pénal, et sur une cible bien trop large. Il semble que les Sages reprochent à l'exécutif, dans son souci, justement, de ne pas faire une loi de circonstance qui serait invalidée, ait donné la possibilité de couvrir beaucoup trop de turpitudes bancaires.
On ne peut pas non plus faire n’importe quoi même animé des meilleures intentions du monde.
Et c'est fort dommage.
Je vous ai donné les chiffres de la menace. En fait il n’y en n’a pas de plus lourde en ce moment sur les finances publiques (en attendant la remontée des taux d’intérêts). Pour le coup, on va regarder de très près comment le gouvernement se sort de cette affaire, parce qu'en l'état actuel des choses, il est rigoureusement impossible d'estimer le prix de la faillite de Dexia.
La seule image que je trouve, elle est impropre, excusez moi, c'est celle d'une réaction chimique devenue incontrôlable, celle d'un magma dont vous regardez l'évolution sans pouvoir en prévoir la direction, encore moins l'issue.
Oui, c'est assez chaud.
Mais je permets, en conclusion, un petit rappel aux hystériques de la réforme bancaire. Dans la zone Euro, trois pays se battent avec des problèmes bancaires importants : Espagne, Allemagne et France. Tiens, chaque fois ce sont des banques de taille moyenne, dont on veut nous faire croire qu’elles sont la panacée. Les caisses régionales espagnoles, Hypo real et les landes banken allemandes et donc Dexia. Avouez que c’est ballot. Si on regarde les choses froidement, on réalise que le problème bancaire est bien plus un problème de contrôle qu’un problème de taille. Ah oui, mais alors, ça devient un peu complexe, ça ne rentre plus dans les slogans de campagne électorale et dans les titres de blogs.
Décidemment, ces banquiers ne savent pas se tenir.