Le riche, cette matière première
David Cameron confirme qu'il décide d'investir dans une nouvelle matière première, celle des fortunes émergentes, la France sert à merveille sa stratégie.
Jamais un dirigeant européen n’avait été si franc dans la revendication d’une concurrence fiscale brutale. Même les Irlandais avaient fait preuve d’une certaine discrétion sur leur taux d’impôt sur les sociétés. Cameron n’aime pas la discrétion. Alors lisons ce qu’il dit à des entrepreneurs venus du monde entier sur la côte pacifique: "Quand la France instituera un taux de 75% pour la tranche supérieure de l'impôt sur le revenu, nous déroulerons le tapis rouge, et nous accueillerons plus d'entreprises françaises, qui paieront leurs impôts au Royaume-Uni, cela paiera nos services publics et nos écoles."
En fait, il se fout de nous. La taxe à 75% n’amènera pas de délocalisation d’entreprises, il le sait très bien, son taux d’imposition sur les entreprises est peu ou prou celui de la France. Cameron ne parle pas de ça, Cameron fait du marketing. Il envoie un signal au monde: vous avez de l’argent, l’Angleterre fera le maximum pour ne pas y toucher. Les Français ne sont qu’une anecdote dans cette affaire, il a mis en place une vaste politique de défiscalisation des "étrangers", d’où qu’ils viennent. Il pense davantage d’ailleurs au monde émergent. Après être devenu la capitale des oligarques russes, Londres doit devenir la capitale des riches Chinois, Brésiliens, Mexicains, Indonésiens… que sais-je.
Et le but est bien de les considérer comme un matière première, un gisement. Une matière première ne paie pas d'impôts, mais autour des mines, des puits, naissent des activités, des entrepreneurs, de la consommation, qui eux, sont taxés. Allez savoir si ça n'est pas le pétrole de ce nouveau siècle, quand on voit que les rythmes de la mondialisation font émerger chaque jour de nouveaux milliardaires (Cap Gemini vient de nous donner le chiffre 2011: 11 millions de millionnaires dans le monde. Pour la première fois de l'histoire, vous en trouverez davantage dans la zone Asie-Pacifique que dans les Amériques).
Mais chacun sait que pour exister, le paradis a besoin de l’enfer. Vous avez compris. Pour se donner une légitimité paradisiaque, Cameron désigne le diable, et ce diable, c’est nous.