«L’hypercroissance se joue d’abord sur le plan de la culture d’entreprise» 1/2
François Bloch, Directeur Général de KPMG France
Les leviers de croissance ne sont pas toujours ceux auxquels on s’attend. Une étude KPMG dédiée aux entreprises en hypercroissance montre que les entrepreneurs français ont d’autres arguments à faire valoir que le seul succès commercial de leurs produits. Et que l’hypercroissance ne pourrait advenir sans la convergence d’un faisceau d’actions et de défis.
En janvier 2018, l’Ifop réalisait pour KPMG une enquête auprès de dirigeants d’entreprises en forte ou en hypercroissance. Complétée par des entretiens qualitatifs et une cartographie, cette étude a permis de sonder 100 dirigeants sur leur perception de la croissance, sur les clés comme sur les freins. "En phase de croissance, il ne suffit pas d’être capable de croître, mais aussi de lutter contre les déséquilibres pour affronter l’hyper fragilité qui va de pair avec l’hyper croissance", prévient François Bloch. Sous la forme de postulats, retour sur les enseignements de l’étude.
Et si le secret de l’hypercroissance tenait d’abord à la culture d’entreprise ?
Voilà la grande révélation de l’étude. La culture d’entreprise et l’état d’esprit des collaborateurs sont le premier levier interne de la croissance de l’entreprise (40% des citations), à peu de distance du levier externe du ‘dynamisme du secteur d’activité’ (45%). Et loin devant le levier ‘innovation Produit’ (29%). Ce constat confirme la tendance : la croissance de l’entreprise tient aussi dans ses forces vives. Et dans la capacité d’un dirigeant à favoriser cette culture interne qui fluidifie les rouages. Capital humain, sentiment d’appartenance, sens du travail, motivation : "Ce n’est pas l’innovation la plus importante, mais le fait que toute l’entreprise soit culturellement orientée vers la croissance, et que cette culture d’entreprise soit impulsée par le fondateur, par le biais de sa vision à long terme, de sa capacité à la répercuter au sein de son organisation et à la faire évoluer", résume François Bloch.
Et si l’hypercroissance était aussi liée à la gestion des talents ?
Le dirigeant n’est pas l’homme-orchestre à qui incombent toutes les tâches, mais le chef d’orchestre qui sait les répartir en s’entourant des meilleurs talents. C’est la difficulté majeure soulevée par les dirigeants : 57% d’entre eux considèrent que la gestion des talents internes et le recrutement de compétences externes rendent l’entreprise vulnérable. D’ailleurs, 71% d’entre eux ont rencontré des difficultés sur ce plan pendant leur période de forte croissance. Au point que beaucoup expriment la nécessité de créer une fonction RH quand elle n’existait pas encore.
Et si l’hypercroissance devait s’accommoder d’une nouvelle forme de gouvernance ?
Conséquence directe des deux précédents postulats, l’organisation traditionnelle de l’entreprise a vécu, au profit de la transversalité. Hiérarchies bousculées, décisions partagées, dirigeants secondés : la pyramide s’effondre, la verticalité se couche, les silos se connectent. L’hypercroissance génère un flux d’effectifs exponentiels qui ne peut se satisfaire d’un modèle archaïque ou artisanal. Les fondateurs d’une entreprise eux-mêmes ne doivent plus craindre l’arrivée d’un DG qui gère l’interne. Cette gouvernance à géométrie variable doit même faire partie de toute stratégie dès la création de l’entreprise.
Et si l’hypercroissance dépendait de la R&D et du pilotage de la performance ?
Investir dans l’outil de production et/ou la R&D, puis renforcer le pilotage de la performance et du contrôle de gestion sont les deux actions prioritaires par excellence pour maintenir la croissance à moyen terme. Si la première relève de la logique même de la croissance, la seconde témoigne de la nécessité pour un dirigeant d’être ultra réactif : la mise en place d’indicateurs de performance situe l’entreprise sur son marché et définit son degré de puissance. Conjugués à l’intuition de l’équipe dirigeante, ces indicateurs servent d’instruments de décision immédiate : car l’hypercroissance s’épanouit mieux dans la réactivité et l’anticipation.
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